Résoudre des problèmes mathématiques en primaire



Comment aider son enfant à résoudre un problème mathématique ? Voilà une question qui revient souvent, que son enfant soit scolarisé, à la maison ou suivant un cours par correspondance...

Il est essentiel de travailler en simultané l’apprentissage des techniques opératoires et la résolution de problèmes. En effet, la technique est au service du raisonnement, elle sert donc à résoudre des problèmes qui au fil des années s’avèreront de plus en plus complexes, de véritables petites enquêtes !

Qu'entend-on par sens opératoire? Il s'agit de la signification de l’opération. Que veut dire additionner? Soustraire? Diviser? Multiplier?

Qu'entend-on par technique opératoire? Il s'agit là de la façon de présenter une opération puis de résoudre le calcul.

Il importe donc de commencer par apprendre le sens opératoire c’est-à-dire que nous apprenons à l’enfant ce que signifie additionner ou diviser bien avant de s’attacher à la présentation et la technique.Au moyen d’exercices de manipulation nombreux et variés mais aussi de petits problèmes oraux présentés sous forme de petites histoires, nous amenons l’enfant à comprendre que:
- additionner, c’est mettre ensemble, faire un tout, regrouper,
- soustraire, c’est enlever ou faire la différence (et ces deux façons de dire sont très importantes),
- multiplier, c’est répéter plusieurs fois la même quantité,
- diviser, c’est faire un partage égal, partager pour que chacun reçoive la même quantité.

Une fois le sens opératoire vu et travaillé, il faut proposer rapidement à la suite des problèmes à résoudre à l’enfant oralement ou par écrit. Il faut que l’enfant trouve un écho au travail du sens opératoire rapidement dans des situations concrètes. Les mathématiques sont concrètes, sont notre quotidien. Voilà ce qu’il faut que l’enfant retienne.


A quoi peut ressembler une petit problème oral ?Avant de parler d'addition ou de soustraction  (ou multiplication ou division) à l'enfant, il est préférable pendant une période plus ou moins longue suivant les enfants (mais de manière répétée et régulière) de lui raconter des petites histoires concrètes et un peu théâtralisées dans lesquelles il aura à répondre à la question finale.
"Tu te promènes dans la forêt, c'est l'automne et par chance tu ramasses 4 châtaignes puis un peu plus loin en chemin, encore 3. Combien as tu de châtaignes à rapporter à la maison?" ou " Jean voulais rapporter des mûres à sa maman pour faire des confitures. Il les a comptées, pour le moment il en a 12 mais il tombe et patatras, 5 roulent dans la terre. Combien lui en restera-t-il?"
Les détails de l'histoire sont importants. Ils permettent que l'enfant s'intéresse à votre histoire d'une part et d'autre part, ils l'obligent à faire naturellement le tri entre ce qui lui est nécessaire pour répondre et ce qui ne l'est pas.
Si votre enfant, face à l’intitulé d’un problème vous dit qu’il ne sait pas quelle opération faire, il y a de fortes chances que le passage à l’abstraction et à la technique se soit fait trop vite, ou que la résolution de problèmes (donc de mises en situations concrètes) soit passée en second plan derrière la technique opératoire si bien que l’enfant a perdu le fil du raisonnement, en a oublié le sens opératoire. Il importe donc d'y revenir.
Traduire l'histoire en langage mathématique oral:et voilà que nous demandons à l'enfant de "parler mathématicien"! Ainsi nous pouvons par exemple poser à l’enfant des questions comme « si je te donne 3 carambars et que ton frère t’en donne 2. Combien auras tu de carambars en tout?». Là il s'agit de l'histoire (du problème)- oui bizarrement, ils arrivent toujours à trouver les réponses quand il s'agit de bonbons...
puis ensuite, nous devons nous attacher à reformuler ce que nous dit l’enfant : « tu as mis ensemble mes carambars et ceux de ton frère pour trouver. En langage mathématique, on dit que tu as fait un calcul, une addition, tu as fait 3 plus 2, ce qui fait 5 en tout » etc…ainsi l’enfant entend bien l’association « faire en tout » et « addition ».
Ensuite, viendra la traduction en langage mathématique écrit:le mathématicien écrira 3+2=5.

Dès le début du primaire, nous devons faire comprendre à l’enfant que nous amuserons à parler une autre langue, la langue mathématique, la langue des mathématiciens. Il ne faut pas hésiter à utiliser ce vocabulaire, cela plait à l’enfant. Ainsi, nous pouvons demander à l’enfant, une fois sa narration faite, de traduire cela en langue mathématique. 
Par exemple : 
-E : il faut que je cherche combien j’ai de carambars en tout
- M : oui ! Traduis le pour les mathématiciens !
- E : il faut que je fasse 3 plus 2 égal 5

Mettre en mots:
Lorsque l’enfant lit un énoncé, il y a une étape fondamentale à ne pas sauter : lui faire raconter « l’histoire » avec ses mots. Cette étape a l’air de rien mais elle est en réalité indispensable à la construction du raisonnement. Souvent, en effet, l’enfant, si on n’y prend pas garde (c’est très vrai lorsque l'on a des scolarisés en soutien scolaire) cherche non pas à comprendre l’enjeu, la question, les étapes pour arriver aux résultats, parfois même pas vraiment à lire la question mais à terminer l’exercice au plus vite en proposant au hasard une opération à poser. 

Il est essentiel ici de lui demander de lire à haute voix l’énoncé puis de lui demander de raconter avec ses propres mots ce qu’il a compris de l’histoire (oui, je sais, je suis une obsédée de la narration orale...!). Nous parlons bien ici d’histoire et non de problème ("peux tu lire l'histoire s'il te plaît?"). L’enfant entre ainsi plus volontiers (enfin en théorie) dans l’exercice. Cela vous permettra de déceler ce qui est compris de ce qui ne l’est pas, de déterminer ce qui relève souvent non pas d’une difficulté mathématiques mais d’une difficulté de langage ou de vocabulaire (parfois aussi simple qu’un prénom inconnu de l’enfant!). Nous pouvons accompagner la narration orale de questions pour aiguiller l’enfant et l’aider (sans raisonner ou répondre à sa place, attention à la formulation des questions) à lever toutes les ambiguïtés.
Raisonner : Cette étape se fait parfois après, parfois en même temps que la narration orale. Il s’agit de faire entrer un peu plus l’enfant dans la réflexion. Nous posons des questions. Par exemple :
- de quoi s’agit-il ?
- que te demande-t-on ?
- que dois-tu chercher ?
- telle information te sera-t-elle utile ? Pourquoi ?
- quel chemin vas-tu prendre dans ta tête ?
- quelles étapes pour y parvenir ?
- pourquoi veux-tu faire une division ?

Etc…
Afficher l'image d'origineTout ça pour un problème?! Mais c'est très long! Rassurez-vous, il s'agit d'une progression sur tout le primaire! Ensuite, une fois la mise en place et les bonnes habitudes prises, l'enfant résoudra de plus en plus seul et de mieux en mieux. Croyez-moi, le billet est plus long à écrire que l'enfant à résoudre son problème! Certaines étapes ne prennent que quelques minutes!
Voici un exemple de séance de problème. Il ne s’agit que d’une mise en situation, il pourrait y avoir de nombreuses variantes, d’autres questionnements etc…je le propose uniquement pour vous faire une idée concrète de séance.(problème CE2, méthode Singapour, librairie des écoles)

- Maman : peux-tu lire le problème à haute voix ? 
- Enfant : Monsieur Ben Saber reçoit une cargaison de pastèques qui pèse 150kg. Cela représente 112 kg de moins que la cargaison d’ananas que Monsieur Ben Saber reçoit le même jour. Combien pèse la cargaison d’ananas que monsieur Ben Saber a reçue ? 
- M : raconte-moi l’histoire
- E : c’est Monsieur Ben Saber qui a reçu des pastèques et des ananas.
- M : ok. Qu’est-ce qu’on te demande de chercher ?
- E : combien il a d’ananas.
- M : ok. On veut que tu trouves le poids de la cargaison d’ananas. Sais-tu quelle quantité de fruits il a reçu ?
- E : oui, 150kg de pastèques et 112kg d’ananas.
-M : peux-tu me lire les phrases où c’est raconté ? 
- E : une cargaison de pastèque qui pèse 150kg. 
- M : ok pour les pastèques, sa cargaison est de 150kg, ce qui veut dire qu’il a 150kg de pastèques. Et pour les ananas ? 
- E : cela représente 112kg de moins…ah non, je me suis trompé ! 
- M : Oui, tu t’es trompé parce que si le texte te disait qu’il y 112kg d’ananas, il ne te demanderait pas de chercher la quantité d’ananas ! Ça veut dire quoi 112kg de moins que la cargaison d’ananas ?


C’est sur cette tournure de phrase qu’en réalité l’enfant va buter. Il faut l’amener à comprendre que cela revient à dire que monsieur Ben Saber a 112kg d’ananas de plus que de pastèques. Et là le dessin peut être intéressant.
Le dessin: ah voilà ma deuxième marotte, après la narration orale, voilà le dessin...! Le schéma est peut être un moyen pour l’enfant de visualiser le problème. Nous pouvons résoudre les problèmes simples avec un peu de matériel. Il faut le faire chaque fois que c’est possible et surtout nécessaire. Mais à partir d’un certain niveau de problèmes, nous ne disposons plus du matériel en quantité suffisante. Il faut donc utiliser le schéma. Dans un premier temps, nous réalisons le schéma devant l’enfant, peu à peu, il les fera seul. 

Enfin, la présentation, la phrase de synthèse: selon moi, il y a plusieurs options possibles.
- on peut vouloir appliquer la méthode de grand-papa avec un côté pour les opérations, l'autre pour les phrases explicatives et la phrase de réponse.
- on peut proposer un cadre pour les recherches. L’enfant est libre de l’utiliser comme il le souhaite (dessins, schémas, opérations etc…) et demander à l’enfant une phrase de synthèse et l’opération au propre (ou non)

En revanche, la phrase de synthèse ne doit pas être une option. Et là, Merepoule est contente, elle arrive à caser son troisième point obsessionnel "l'écrit"...Elle a son trépied ! Elle est une poule heureuse !
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Il est important de faire rédiger une phrase par l’enfant car elle lui permet de revenir au problème de départ, de quitter la langue du mathématicien pour revenir dans la vie réelle avec le langage du quotidien. Quand la résolution est un peu longue, il peut arriver à l’enfant de ne plus se souvenir de ce qu’il cherchait finalement, du pourquoi il a fait tout ça ! La consigne est simple : pour écrire ta réponse, fais une phrase complète qui reprend les mots de la question.

Les problèmes à étapes : un problème à étapes est un problème dont la question finale nécessite de faire plusieurs calculs intermédiaires. Dans un premier temps, on propose à l’enfant des problèmes où figurent les questions intermédiaires et dans un deuxième temps, ce sera à lui de les trouver tout seul. La démarche de résolution reste bien entendu la même. Dans la présentation, nous pouvons demander à l’enfant de faire figurer les calculs et des phrases de synthèse intermédiaires.
Un petit exemple ? "4 enfants se cotisent pour acheter un cadeau à leur grand-mère. A la caisse, ils donnent 100€ et reçoivent 48€ de monnaie. Sachant qu’ils ont tous donné la même somme, combien chaque enfant a-t-il dépensé ?"
Il faut que l’enfant trouve l’étape intermédiaire pour répondre à la question finale. Il devra d’abord calculer la dépense totale avant de trouver la dépense individuelle.

Enfin pour répondre à tous ceux qui me disent et m'écrivent que l'enfant n'a pas besoin d'apprendre tout ça, et que la preuve est qu'on ne se sert jamais de ce qu'on a appris à l'école et que de toute façon c'est oublié, je dirai ceci :
1. Les problèmes de primaire sont des situations concrètes que nous sommes tous amenés à rencontrer un jour dans notre vie quotidienne, familiale, professionnelle.
2. Grâce aux problèmes (et aux apprentissages "scolaires"), nous avons appris à raisonner, à présenter une argumentation, à justifier notre point de vue, à trier des informations pour aller à l'essentiel, à restituer ce que nous avons compris de manière claire et structurée. Nous pouvons ne pas avoir encore été confrontés à des problèmes de robinetterie qui fuient, de nécessité de calcul de volume d'eau, de calcul de trajectoire mais cela ne signifie pas pour autant que ces problèmes ne nous ont rien appris.
3. Ce n'est pas parce que cela ne nous a pas été directement utile que cela ne le sera pas pour nos enfants.
4. Ce qui est certain, c'est que s'il fallait n'avoir qu'une vision utilitariste de la vie, peu de choses nous seraient nécessaires et surtout pas l'art ni la culture...Gardons-nous de ces raisonnements étriqués sous couvert de liberté préservée et d'ouverture d'esprit!






Article rédigé pour "les tutoriels" 

Commentaires

Aurélie B a dit…
Bonjour
Entant que prof de maths en collège, je te remercie pour ce magnifique article. C'est très clair et tout ce que tu dis est extrêmement vrai et important.
Ta méthode est excellente et pose ainsi de bonnes bases pour prendre ensuite du plaisir à faire des maths !
Inna a dit…
Bonjour,

J'ai l'impression de lire la description de la méthode de Singapour!
Je lis votre blog depuis un bon moment et grâce à vous je travaille avec mon fils avec "La bonne méthode de Lecture". Merci!
Cette fois avec les mathématique vous êtes formidable avec le résumé des techniques que je vois dans le livre du "Manuel de mathématique de CP, méthode de Singapour". On a tout juste commencé de travailler avec mon grand sur ce manuel et il commence exactement avec les histoires à raconter d'additions et soustractions. On y parle aussi des phrases mathématiques.
Bonjour Inna, j'utilise les fichiers pour les exercices d'applications et les livres uniquement en soutien de ma progression et des leçons que je fais aux enfants (et oui, je leur fais des leçons au tableau...!). Je ne prétends pas avoir l'exclusivité de la bonne méthode...celle détaillée ici est la mienne et je suis heureuse qu'elle soit partagée et divulguée quel qu'en soit le support!Vous avez choisi la bonne méthode surtout gardez là !

Bonjour Aurélie, alors voilà un commentaire qui me fait vraiment chaud au coeur! On a tellement tenté de rendre mes propos et mes actions illégitimes ces derniers mois, que te lire est un réel plaisir et un grand réconfort! Merci.