Je réponds #1

"pourquoi ne laissez vous pas les enfants compter avec leurs doigts ?"
et question sous-jacente : "avec les doigts, un boulier, ou des barettes de perles, c'est pareil !"

1) Et bien non, ce n'est pas la même chose. Dans le cas du matériel, l'enfant doit d'abord se donner le mal d'aller chercher puis ranger le matériel. Si bien qu'il cherchera d'abord à trouver sans matériel et n'ira le chercher que si besoin est. Ensuite il sait aussi inconsciemment que le matériel ne sera pas toujours là pour l'aider, c'est temporaire. Dans bien des situations, il ne disposera de rien pour calculer si ce n'est son esprit. Peu à peu, très progressivement, il apprend seul ou avec de l'aide à développer des stratégies de calcul mental rapide. Dans le cas des doigts, il comprend vite que, par essence, ils seront toujours à sa disposition sans fournir d'efforts. Il ne cherchera jamais à développer des stratégies de calcul mental rapide.
 
2) Dès lors qu'on laisse un enfant compter avec ses doigts  au lieu de s'appuyer soit sur des tables apprises, soit sur des stratégies, il le fera systématiquement et ne fera pas l'effort ni de réfléchir ni de mémoriser.
 
3) Viendra ensuite la maitrise des techniques opératoires. L'enfant pose alors systématiquement les opérations et si l'on n'y prend pas garde (ou s'il est à l'école ...! Lol), il ne cherche plus à calculer rapidement, il cherche à poser l'opération dans sa tête ! On observe alors des comportements du style : 13-4 = ? Et l'enfant vous dira alors "3 - 4 c'est pas possible, il faut mettre une retenue "...!!!
 
3) par stratégies, j'entends par exemple :
- regrouper pour faire 10 parce que c'est plus facile, par ex : 7+5+3+1, je regroupe 7 et 3 qui font 10 et 5 et 1 qui font 6 donc cela fait 16
- décomposer dans sa tête les nombres, puis procéder à des regroupements, par ex : 34+22 = 10+10+10+4+10+10+2=50+6=56
- inverser les opérations, par ex 8-2, je sais par coeur que si 6 et 2=8 donc 8-2=6
- ajouter 9, c'est ajouter 10 et ôter 1
- ôter 9, c'est ôter 10 et ajouter 1
- diviser par 2, c'est prendre la moitié. Ainsi je peux décompser et diviser, par exemple 54:2, la moitié de 50, c'est 25, la moitié de 4 c'est 2, donc la moitié de 54 c'est 27. Vous n'imaginez pas le nombre d'enfants qui ont poussé des cris effrayés "han,il faut que je pose la division dans ma tête ! Mais je n'y arriverai jamais...!"
Je ne vous donne là que quelques exemples très simples, la liste est longue et plusieurs stratégies sont possibles pour un même calcul.
 
Quand l'enfant compte sur ses doigts, son esprit n'est  jamais disposé à faire l'effort de mémorisation (du style 5 et 4, 9) ni celui de réflexion, l'enfant n'en prend pas l'habitude et ses compétences en calcul mental ne progressent pas. Voilà pourquoi, il faut lui demander de ne pas compter sur ses doigts et lui montrer comment faire autrement.

Commentaires

laurence a dit…
Tout a fait d accord avec vous et cela commence dès la maternelle et en soutient ou avec mon petit fils on est obligé de se battre pour effacer les mauvaises habitudes ;
Sophie a dit…
Merci mere poule pour ce post instructif, qui me confirme que je dois persévérer et lutter contre les doigts!
Pour ma part, je puis temoigner que compter sur ses doigts n'empêchera pas un enfant de faire de bonnes études orientées mathématiques, mais que dans la vie de tous les jours, je constate a quel point c'est gênant de n'avoir développé aucune stratégie mathématiques! Alors merci car j'avais un peu tendance à laisser filer...
À bientôt
Sophie
Cilou a dit…
Merci pour ce post.
Je me rends compte en le lisant que moi-même j'ai gardé longtemps l'habitude d'utiliser mes doigts, et c'est finalement à l'âge adulte que j'ai commencé à développer mes stratégies de calcul mental! on ne m'avait pas appris et j'étais restée à la facilité...Pourtant, c'est une gymnastique amusante.
Ca ne m'a pas empêchée de suivre une filière scientifique, mais c'est vraiment embarrassant au quotidien
Une idée que je retiens pour mes enfants quand ils auront l'âge.